27. Dez. 2008
Liberté
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«Nous savions pourquoi Hansjörg Walter était la bonne alternative»
Ueli Maurer s'apprête va prendre ses fonctions après une élection particulièrement hasardeuse. Les «comploteurs» qui ont failli l'en empêcher persistent: Hansjörg Walter n'était pas un candidat alibi.
De Berne: François Nussbaum
Elu à une voix d'écart, Ueli Maurer a d'emblée parlé de «concordance restaurée», après l'éviction de Christoph Blocher un an plus tôt. On continue de faire dire au mot concordance tout et son contraire. Le conseiller national Andreas Gross comptait parmi les soi-disant comploteurs, mais qui agissaient – au grand jour - au nom d'une conception précise de ce terme. Il s'en explique.
Avec l'élection de Ueli Maurer, faut-il parler de concordance sauvée, partiellement restaurée, fragilisée, enterrée?
Andreas Gross: Avant de lui accoler un adjectif, il faut définir ce qui était à sauver ou à perdre. Le problème, c'est qu'on ne s'est pas encore entendu sur le fond. Mais je dois constater que les choses ont un peu évolué depuis quelques années, disons depuis qu'Adolf Ogi a mené une politique militaire qui n'était pas dans la ligne de son parti, l'UDC.
On sait désormais qu'il y a au moins deux conceptions de la concordance. L'une, revendiquée par Ueli Maurer, reste purement arithmétique: les principales forces politiques doivent être représentées au gouvernement. L'autre, que j'essaie de défendre, est fondée sur des valeurs: avant tout, le respect de l'autre. On est d'ailleurs plus sensible à ce débat en Suisse romande: côté alémanique, on en est resté à «pour ou contre l'UDC», ce qui n'était pas le problème.
Pour vous, le nouvel élu répond aussi peu à cette exigence que Christoph Blocher?
Ils sont très différents par leurs origines, leur identité, leur caractère. Mais Ueli Maurer a expliqué dans une interview qu'en tant que président de l'UDC, il avait pour mission de faire progresser son parti et qu'à ce titre, «tous les moyens étaient bons». Pour moi, un tel discours disqualifie son auteur, du point de vue de la concordance.
C'est totalement irresponsable: il n'est pas conscient des dégâts qu'il a faits dans la société et en politique. Il y a aujourd'hui tellement de jeunes qui se détournent de la politique parce qu'elle leur apparaît comme l'art du coup bas et de la dévalorisation des autres, sans répit et sans limite.
Peut-on y échapper?
Quand on parle de respect de l'autre, ce n'est pas une simple question de style. Il faut admettre que la différence est nécessaire pour forger son propre point de vue: on respecte l'autre parce qu'on en a besoin. Le totalitarisme provient du fait qu'on s'arroge le droit d'écraser l'autre parce qu'on estime ne pas en avoir besoin. La majorité qui a élu Ueli Maurer semble n'avoir eu aucune gêne à payer ce prix. C'est préoccupant.
En quoi Hansjörg Walter, son adversaire le 10 décembre, répondait-il mieux aux exigences de cette concordance?
Quant on respecte l'autre, on a en même temps à cœur d'éviter de le marginaliser, surtout quand on est dans la majorité. Comme président de l'Union suisse des paysans, Hansjörg Walter sait ce que cela signifie: il voit quotidiennement des gens perdre leur travail, leur raison de vivre, leur identité. Nous savions bien pourquoi il pouvait, selon nous, entrer au Conseil fédéral. Ce n'était surtout pas une candidature alibi pour mener une pure opération anti-Maurer.
C'est d'ailleurs ce sens des responsabilités envers les «petits» qui va probablement manquer à l'avenir. Si, comme certains l'affirment, nous entrons dans une période de crise sans précédent, plus profonde que celle des années 30, fallait-il élire quelqu'un qui revendique son appartenance au parti «le plus ultra-libéral» de l'échiquier politique, dans un moment où il faut tout faire pour éviter que des gens restent sur le carreau?
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