11. Okt. 2014
RTS
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Andreas Gross, semi-prolétaire intellectuel
Ecouter l'emission «L'horloge de sable» (1h 30 min.)
Dans sa suissitude du mois, Martin Heule s'est rendu à Berne et à St-Ursanne en compagnie du conseiller national zurichois, présent depuis une vingtaine d'années sur la scène helvétique et internationale dans les rangs du Parti socialiste. Membre fondateur du Groupe pour une Suisse sans armée (GSSA), Andreas Gross veut avant tout faire avancer la cause pacifiste dans la résolution des conflits et s'active dans son Atelier pour la démocratie directe à défendre un modèle en perpétuelle évolution.
Né à Kobé au Japon en 1952, Andreas Gross confesse volontiers garder de fortes impressions du Soleil Levant où il a grandi jusqu'à l'âge de sept ans. Cette naissance aux antipodes semble lui avoir donné des ailes. En continuel déplacement, le conseiller national zurichois rêve maintenant à d'autres voyages, moins liés à la politique nationale et internationale dont il s'occupe à plein temps.
emi-prolétaire intellectuel
C'est au sein des Jeunesses socialistes qu'Andreas Gross et quelques camarades ont voulu briser le tabou de l'armée en Suisse. Fort estimée depuis la Mobilisation durant la Deuxième Guerre mondiale, l'armée de milice ne souffrait après-guerre aucune contestation et envoyait en prison les objecteurs de conscience. Contre cette domination antidémocratique, Gross a voulu qu'on en débatte publiquement en accord avec la culture démocratique du pays depuis la fin du 19e siècle.
Contre l'hégémonie de la délégation
Depuis la création de la Confédération en 1848, l'Assemblée fédérale jusqu'à la fin du 19e siècle était dominée par des radicaux et libéraux éloignés des réalités quotidiennes des petites gens. Cet écart, voire ce fossé, a été comblé en partie par l'adoption de l'initiative populaire et du référendum. Ces deux instruments permettent à cent mille ou cinquante mille citoyennes et citoyens aujourd'hui de compléter la Constitution ou de combattre une loi adoptée par le parlement. Mais le démocratie, pour Andréas Gross, se révèle bien plus complexe que la victoire dans les urnes de la majorité sur la minorité. Tout un jeu subtil de pressions, de compromis, de discussions plus ou moins officiels concourent à nourrir un processus en perpétuel mouvement.
Atelier pour la démocratie directe
Après une solide expérience au sein du législatif communal de la Ville de Zurich, Gross fut élu sur la liste socialiste au Conseil national en 1991. Son combat en faveur d'une Suisse sans armée l'a porté et fait connaître au-delà de sa région linguistique. Mais c'est en qualité d'enseignant dans diverses universités, en Suisse comme à l'étranger, qu'il a poursuivi sa réflexion sur le processus démocratique face à la délégation parlementaire. En créant en 1989 un Atelier pour la démocratie directe, il a innové. Aujourd'hui hébergé à son domicile jurassien de St-Ursanne, ce centre de documentation et d'action élargit les compétences du conseiller national au-delà des frontières.
Penser l'Europe
Curieusement, il s'est opposé en décembre 1992 à l'EEE, l'Espace Économique Européen, dont le refus par le peuple, suite du référendum lancé par Christoph Blocher, fut vécu comme un traumatisme fédéral, notamment par la divergence significative entre Suisses romands, largement pour, et Suisses alémaniques, contre. Gross ne voulait pas renforcer des institutions de type économique et rappelle volontiers, au cours de sa visite du Palais fédéral à Berne en compagnie de Martin Heule, combien les lobbies agissent dans les coulisses et influencent fortement les décisions parlementaires. Ce qui s'avère parfois dérangeant en Suisse est pourtant officiellement admis au sein du Parlement européen où cinq mille lobbies ont été enregistrés. Dès lors, comment prendre sereinement et démocratiquement les décisions qui s'impose pour le bien commun.
C'est à cette question qu'Andreas Gross entend répondre, par exemple en oeuvrant discrètement au service des démocraties émergentes dans les pays de l'Est. Contrôleur d'élections, expert en relations internationales au service de la paix et délégué de l'Assemblée fédérale à Strasbourg, le sexagénaire ne baisse pas les bras. Sa retraite politique à la fin de cette législature lui laissera le temps de pêcher mais pas d'abandonner un long combat pour ce système politique, la démocratie, «le plus mauvais à l'exception de tous les autres», comme ironisait si bien Churchill.
Réalisation: Christian Ciocca et Dominique Stalder
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